Vox – Christina Dalcher

Auteure : Christina Dalcher
Date de publication : 7 Mars 2019
Date de lecture : Mai 2019
Genre/Thème : Dystopie, Condition de la femme, Religion, Politique
Nombre de pages : 432

Jean McClellan est docteure en neurosciences. Elle a passé sa vie dans un laboratoire de recherches, loin des mouvements protestataires qui ont enflammé son pays. Mais, désormais, même si elle le voulait, impossible de s’exprimer : comme toutes les femmes, elle est condamnée à un silence forcé, limitée à un quota de 100 mots par jour. En effet, le nouveau gouvernement en place, constitué d’un groupe fondamentaliste, a décidé d’abattre la figure de la femme moderne. Pourtant, quand le frère du Président fait une attaque, Jean est appelée à la rescousse. La récompense ? La possibilité de s’affranchir – et sa fille avec elle – de son quota de mots. Mais ce qu’elle va découvrir alors qu’elle recouvre la parole pourrait bien la laisser définitivement sans voix…
Christina Dalcher nous offre avec Vox un roman dystopique glaçant qui rend hommage au pouvoir des mots et du langage.

Pas lu.


J’ai littéralement dévoré ce roman en quelques jours à peine. Il est dur, dépeint un monde où la religion renverse le droit des femmes pour les museler. À la différence de Handmaid’s Tail, ils ne les tuent pas, ce qui est bien plus logique. L’Amérique revient dans les années 50. En ayant destitué toutes les femmes de leur emploi respectif, il n’y a donc plus de chômage. Le révérend et le Président s’en servent comme argument fondateur de leur doctrine.
Je trouve cependant que le slogan « Quand parler tue. » n’est pas honnête, car non, personne ne meurt en parlant. Mais on peut supposer que c’est métaphorique : la mort des droits de la femme. Je préfère la transparence car au final, on s’attend à ce que les bracelets comptes-mots électrocutent à mort, alors que non. Il y a juste une scène assez dure où l’électricité ronge la chair jusqu’à l’os du poignet et nécrose la main d’une voisine.
Vox est écrit à la première personne, nous suivons une neurolinguiste, mère de 4 enfants, qui en attend un cinquième, de son amant. Bien évidemment, ce genre de choses n’est pas toléré dans ce nouveau monde que le Révérend veut « purifier » en instituant des camps, en obligeant les homosexuels à revoir leur sexualité pour qu’elle se « normalise » selon lui.
Cette dystopie est effrayante. La religion a perdu son trône dans notre monde, c’est ce que je croyais… Mais quand on voit que les droits à l’avortement sont proscrits en ce moment en Alabama et que les Américains manifestent (de la Californie à New-York, le 21 Mai 2019) car Trump veut retirer ce droit… Que la Louisiane s’y met… Oui, ça fait peur.
Ce roman suscite colère, dégoût, tristesse.
À diverse époques, les hommes ont asservi la femme, car elle a le pouvoir. Elle seule peut enfanter, donner la vie. C’est une Magie que nous possédons, inhérente de génération en génération. Toutefois, on semble oublier qu’il fut un temps où nous étions vénérées et respectées pour cela. D’autres tribus, d’autres mœurs.
Pour en revenir à ce roman, je crois qu’il mérite d’être lu, que vous soyez féministe ou non. Parce que qui voudrait d’un tel monde ? À part les conservateurs arriérés, j’entends. Et visiblement, ils sont nombreux…
Je ne me suis pas sentie proche de Jean. Mais j’ai compati pour elle. L’instigation de faux bracelets aurait dû voir le jour bien avant. Impossible qu’un seul homme se soit penché sur la question en 1 an… Alors oui, cet asservissement les arrange bien. Mais s’ils aiment vraiment leurs épouses, ils trouveront forcément des solutions. Qu’on ne me fasse pas croire qu’il n’y a que des machistes misogynes en Amérique… Si ?…
Quand Steven, le fils aîné de Jean, se fait enrôler dans ce mouvement de Pureté, j’ai trouvé ça bien triste. Une mère enseigne toutes les valeurs indispensables à son enfant pour qu’il grandisse l’esprit ouvert. Le voir de cette manière, ça m’a mise en rogne. Les cours de religion deviennent obligatoires pour entrer à l’université, de sorte que les ados intègrent cette doctrine dans leur cerveau encore malléable.
Les comptes-mots sont imposés dès 3 ans. Mais… C’est l’âge par excellence du caprice, alors qu’ont fait tous ces parents en une année ? Ils ont laissé leurs enfants se faire électrocuter ? Sans parler de ceux qui ont des pathologies bien particulières… Je crois que ce point a été un peu bâclé. Et Jean a beau dire qu’elle s’est débattue, qu’il y avait des gens armés… Et le peuple dans tout ça ? Il était bien plus nombreux qu’une armée. Il y a toujours des solutions.
L’idée du Révérend dans ce roman est de récupérer le travail de Jean pour créer un sérum Wernicke, capable de provoquer l’aphasie chez toutes les femmes. Il est sacrément malade…
Des caméras sont installées partout. Au moindre langage des signes, les femmes sont embarquées pour travailler dans les champs ou évider les poissons. Plus d’accès aux ordinateurs, aux boîtes aux lettres etc… Juste se reproduire, faire les courses et le ménage.
J’avais hâte de le terminer parce qu’il m’a indignée. Je suis un peu amère mais contente que ça finisse bien. Vox n’a pas fini de faire du bruit, sa voix va retentir longtemps.
Extraits
« Vous n’imaginez même pas, mesdames. Vous ne vous rendez pas compte. On retourne lentement à la préhistoire les filles. Réfléchissez. Réfléchissez à ce qui vous arrivera, et à ce qui arrivera à vos filles, lorsque les lois nous feront remonter le temps. Réfléchissez aux expressions comme « autorisation du conjoint » ou « consentement paternel ». Réfléchissez au moment où vous vous réveillerez un beau matin, en constatant que vous n’avez plus voix au chapitre. »