Deux milliards de battements de cœur / Et si les chats disparaissaient du monde…

Auteur : Genki Kawamura

Date de publication : 09 Novembre 2017

Date de lecture : Juin 2020

Genre/Thème : Drame, Deuil

Nombre de pages : 176

     À 30 ans, le narrateur de ce livre apprend par son médecin qu’il est condamné. Il ne lui reste plus que quelques semaines à vivre. Aussi lorsque le Diable, cet étonnant visiteur en short, lui propose un marché, n’hésite-t-il pas longtemps. Les clauses du contrat ? Effacer, à chaque jour que Dieu fait, une chose de la surface de la Terre lui vaudra 24 heures de vie supplémentaires… Les téléphones, les montres : jusqu’ici, c’est à qui perd gagne… Mais lorsque le Diable lui propose de supprimer les chats, sa vie va alors basculer une deuxième fois…

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        J’avais vu le film il y a quelques années. Du coup, quand je suis tombée sur le roman, je n’ai pas résisté en me disant que je le lirai pour une occasion bien précise. Et la voici, ma seconde meilleure amie a un cancer… Je suis dévastée et j’aimerais l’aider de tout mon cœur… Alors j’ai entamé ce récit, riche en sagesse.

       Notre héros apprend qu’il a un cancer du cerveau en phase terminale. Alors qu’il dresse une liste des 10 choses qu’il aimerait faire, le Diable lui propose un marché : qu’il efface quelque chose pour chaque jour de plus à vivre. Souffrant le martyr, il accepte. Les téléphones disparaissent en premier.

       J’ai beaucoup aimé ce recul, ce monde qu’il dépeint avec une grande sagacité. De nos jours, les gens sont scotchés à leur smartphone, le reste n’a plus d’importance, au point d’oublier l’essentiel. En l’effaçant, les gens se remettent à lire, regarder le paysage dans les transports. Ils sont « plus détendus » décrit-il. C’est tellement vrai ! À notre époque, tout le monde veut tout, tout de suite. Il n’y a qu’immédiateté, le reste disparaît. Plus la place pour se recueillir en soi, dans le silence. Le téléphone qui sonne tout le temps, les notifications… Voilà pourquoi outre les notifications désactivées depuis l’acquisition du mien, des sms etc… j’ai aussi coupé la sonnerie temporairement, étant trop sollicitée ces jours-ci ! La solitude a du bon et sublime la création, qui reste un don de soi, loin de la houle du stress extérieur.

       Donc, notre héros (dont j’ai oublié le nom, mea culpa), essaie de se mettre au clair avant de partir. Il va donc revoir son ancienne petite amie qui va lui rappeler pourquoi ils ont rompu. Après quoi, c’est au tour de son meilleur ami.

       Toutefois… lorsque le Diable lui propose de supprimer les chats, il ne peut s’y résoudre. Il réalise soudain à quel point sa démarche est égoïste. À quel point les hommes ont besoin des chats. Dans son cas, Chou lui a permis de surmonter le deuil de sa mère. Et il n’imagine pas un monde sans lui, même si son familier est prêt à accepter ce sacrifice pour lui laisser un jour de plus à vivre.

       C’est un roman assez court, très touchant, qui fait réfléchir sur notre perception de la vie. Ce qui est important, ne l’est pas, le temps, le bonheur, les futilités de l’existence… Une leçon de vie de Genki Kawamura, producteur d’Ame no Yuki, L’Enfant et la Bête, Miraï ma petite sœur, Your Name etc… À lire absolument.

Extraits

     « Quel est l’imbécile qui se sacrifierait pour le chocolat ? On m’offre l’opportunité de vivre en échange d’une simple sucrerie : il n’y a pas à hésiter. Même à ce niveau, je peux encore trouver des tas de choses à échanger contre ma vie. J’effacerai de pus en plus de choses, je vivrai de plus en plus longtemps : ça me va ! »

     « Les plus amers regrets sont ceux d’un futur qu’on ne connaîtra jamais. Les regrets ne s’appliquent pas qu’au passé… Dans ma tête, à chaque instant, j’entendais cette triste litanie : Si seulement je vivais ! Je ferai ceci, cela... On se rend compte à quel point toutes ces aspirations sont illusoires, contingentes. Qu’elles se réalisent ou non, qu’elles aient existé ou pas, c’est sans importance. Tout comme les choses que je suis censé effacer de la surface du globe. »

     « Il n’est pas difficile de passer à côté de sa vie : il n’y a qu’à se préoccuper uniquement des futilités qui envahissent notre quotidien et nous accaparent tout entiers. Le pire, c’est qu’on n’a même pas conscience de perdre son temps. On a la sensation de ne faire que des choses importantes. Dire qu’il aurait suffi de s’extraire quelques minutes de la ronde infinie des « choses à faire » pour y voir plus clair… »

     « Afin que mon cadavre ne pourrisse pas, il faudrait le maintenir dans de la neige carbonique, moyennant 8 400 yens par jour. Que de frais pour quelque chose d’aussi dérisoire ! L’autel, le cercueil, jusqu’au cadre de la photo posthume… il y avait une échelle de prix pour tout. Même après la mort, les homes trouvaient le moyen de reproduire les inégalités qu’ils avaient créées de leur vivant. Quels cruels et vains animaux nous sommes. »

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